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Se séparer sans divorcer : la séparation de fait est une solution
Tour d’abord souvenons-nous que vivre séparément pour des époux est contraire à la loi puisque l’article 215 du Code civil impose la cohabitation. Cependant, quelques exceptions au devoir de vie commune sont reconnues par la justice et n’impactent pas le lien conjugal. Il s’agit par exemple des couples mariés dont l’un des partenaires est incarcéré, ou encore lorsque l’un des époux est amené à vivre ailleurs pour raisons professionnelles.
Malgré cette obligation légale, il est possible aujourd’hui pour des personnes mariées d’opter pour des logements distincts, la justice favorisant toute alternative au divorce qui autorise le retour pur et simple à la vie maritale. Cela permet de se séparer sans divorcer.
La situation qui résulte d’une simple séparation des époux sans intervention de la justice est une séparation de fait. On peut distinguer :
- La séparation de fait dite convenue lorsqu’elle intervient suite à une décision commune des conjoints.
- À contrario, la séparation de fait est dite non convenue quand la séparation est consécutive au départ du domicile conjugal de l’un des époux sans accord préalable.
Qu’elle soit convenue ou non, la séparation de fait n’est pas régie par la loi, les époux ne sont donc pas officiellement séparés et le mariage n’est pas dissout.
De la même façon, une contribution aux charges du mariage en fonction des revenus respectifs de chacun doit être honorée. C’est notamment le cas pour les frais liés à la santé, l’éducation et les loisirs des enfants.
Séparation de fait ou de corps, quelles sont les différences ?
La différence principale réside en ceci que la séparation de corps est gérée par la loi, tandis que la séparation de fait n’a pas d’existence légale.
Ainsi, la séparation de fait n’a aucune valeur juridique. Les biens des époux ne sont donc pas séparés, sauf dans le cas particulier d’un contrat de mariage qui le prévoit.
De la même manière, la participation aux charges communes qui n’est plus exigée dans le cas d’une séparation de corps est maintenue lors d’une séparation de fait.
Enfin, pour ce qui concerne la déclaration des revenus auprès de l’administration fiscale, elle demeure conjointe dans la situation d’une séparation de fait (pas dans la séparation de corps).
Tableau comparatif : séparation de fait vs séparation de corps
Critères | Séparation de fait | Séparation de corps |
---|---|---|
Définition | Vivre séparément sans décision judiciaire. | Décision du juge autorisant les époux à ne plus cohabiter. |
Cadre juridique | Aucun encadrement légal. | Encadrée par les articles 296 et suivants du Code civil. |
Procédure | Aucune formalité nécessaire. | Jugement du juge aux affaires familiales. |
Conséquences sur le mariage | Le mariage subsiste, avec tous ses effets. | Le mariage subsiste, mais certains effets sont adaptés. |
Obligations entre époux | Maintien du devoir de cohabitation (théoriquement). | Dispense de cohabitation. |
Solidarité des dettes | Maintenue (article 220 du Code civil). | Suspendue après jugement. |
Régime matrimonial | Inchangé sauf contrat spécifique. | Peut évoluer vers la séparation de biens. |
Fiscalité | Déclaration commune à l’impôt sur le revenu. | Déclaration séparée autorisée. |
Nom d’usage | Peut être conservé. | Peut être conservé (sauf opposition judiciaire). |
Dissolution du mariage | Non, sauf si divorce engagé. | Non, mais étape potentielle vers un divorce. |
Durée | Sans limite, tant qu’aucun divorce n’est engagé. | Jusqu’à reprise de la vie commune ou divorce. |
Accès aux aides (CAF, APL…) | Oui, après déclaration de la situation. | Oui, car séparation officiellement reconnue. |
Comment être séparé de fait et qu’est-ce que ça implique ?
Pour se séparer de fait, aucune autorisation de la justice n’est nécessaire. Il est donc très simple de quitter son conjoint quand on est marié.
Lorsque la séparation est convenue, c’est-à-dire consécutive à un commun accord, les époux règlent eux-mêmes les modalités de leur vie à venir tant d’un point de vue pratique et financier que concernant l’éducation et le domicile des enfants. Toutefois, si un litige survenait, la saisine d’un juge serait nécessaire.
En revanche, si un époux quitte le domicile conjugal sans le consentement de son conjoint, la situation est plus tendue, car le partenaire abandonné peut à tout moment déclencher une procédure de divorce pour faute au motif du non-respect de l’obligation de cohabitation.
C’est pourquoi il paraît judicieux pour celui qui part d’envoyer un courrier postal avec accusé de réception afin de préciser :
- Sa décision de se séparer
- Sa nouvelle adresse
- Les dispositions qu’il suggère pour l’organisation de l’éducation des enfants
- Le paiement d’une pension
- L’acquittement des prêts en cours
- …
À savoir : si la séparation de fait est avérée depuis plus d’un an, l’article 237 du Code civil prévoit que le divorce peut être demandé pour altération définitive du lien conjugal.
Par ailleurs, outre l’obligation de contribuer aux charges du ménage, d’autres droits et devoirs des personnes mariées persistent :
- Le devoir de respect mutuel, de secours et d’assistance
- La possibilité de conserver le nom de l’époux
- La qualité d’héritier au décès du conjoint
- L’exercice de l’autorité parentale
- ….
Notez aussi que le domicile conjugal doit rester ouvert au conjoint qui est parti. De plus, quitter le domicile sans décision judiciaire ne met pas fin aux obligations liées au logement : en cas de bail commun, les deux époux restent solidairement responsables du paiement du loyer et des charges auprès du bailleur.
Séparé de fait après mariage : quels sont les risques ?
Au titre des risques, et il s’agit ici d’une situation maintes fois avérée dans le cas d’une séparation de fait, l’un ou l’autre époux peut être confronté à un remboursement de dette pour des dépenses qu’il n’a pas engagées.
En effet, l’article 220 du Code civil impose la solidarité financière quand il s’agit de dépenses pour le ménage ou l’éducation des enfants, et ce quel que soit le régime matrimonial.
Il peut s’agir de dépenses liées au logement :
- Quittance de loyer
- Facture d’eau, d’électricité, de téléphone
- Règlement d’une cotisation d’assurance habitation
- Achats d’appareils électroménagers
- …
Les dépenses engagées peuvent concerner les enfants :
- Frais liés à la scolarité
- Coût des vacances
- …
Les frais peuvent encore être dits de “vie courante” comme les dépenses engagées au titre de la santé ou de l’assurance vieillesse.
La loi prévoit 3 exclusions au principe de solidarité entre époux :
- En cas de dette indiscutablement excessive, comme par exemple l’achat d’une voiture de luxe pour une famille modeste
- Les achats à tempérament ou les emprunts sauf s’ils ont été contractés préalablement à la séparation ou expressément consentis par les deux époux
Au regard des risques encourus à installer une séparation de fait, peu d’avantages s’en dégagent si ce n’est qu’aucune procédure judiciaire n’est nécessaire, ni pour se séparer ni pour reprendre la vie conjugale.
Il existe toutefois quelques dispositifs qui peuvent vous apporter de l’aide si vous optez pour ce type de séparation. La Caisse d’allocations familiales peut intervenir en prenant en compte votre situation d’isolement.
Quelles aides de la Caf séparation sans divorce ?
Se séparer sans divorcer implique bien sûr des modifications dans l’organisation de la vie courante. Pour vous accompagner, pensez à la Caisse d’allocations familiales car cette administration est attentive aux situations difficiles et en particulier lorsque des enfants sont concernés.
En effet, votre organisme de prestations familiales peut vous proposer diverses formes de soutien :
- Des aides financières
- Un accompagnement élargi (informations, conseils…)
Important : pour bénéficier des aides de la Caf après une séparation de fait, il est indispensable de déclarer votre changement de situation directement depuis votre espace personnel sur caf.fr.
Séparé de fait Caf : plusieurs allocations selon votre situation
En tout premier lieu vous êtes concerné(e) par l’allocation de soutien familial, ASF, si vous vivez seul(e) avec un enfant et que vous ne percevez pas de pension alimentaire de la part de l’autre parent ou qu’elle n’atteint pas le montant de 199,18 euros.
Par ailleurs, selon vos nouvelles conditions de vie vous êtes susceptible d’être éligible au versement d’autres aides financières :
À savoir : En ce qui concerne la pension alimentaire la Caf est habilitée à intervenir auprès du parent mauvais payeur afin de le contraindre à honorer ses obligations parentales d’entretien et d’éducation.
Par ailleurs, sachez que vous pouvez solliciter auprès de la Caf une aide financière ponctuelle si vous rencontrez des difficultés importantes.
Séparation de fait : la Caf vous conseille et vous informe
Outre les mesures financières directement liées à votre nouvelle situation, la Caf peut aussi vous proposer :
- “Parents après la séparation”, un dispositif de séances d’information sous forme de rencontres entre parents séparés, ce qui permet échanges et accès à diverses informations
- Si vous êtes en conflit avec l’autre parent au sujet des enfants une médiation familiale est possible
- Si votre nouvelle vie familiale nécessite le recours à un professionnel à domicile pour vous aider dans la gestion du quotidien la Caf peut intervenir également
- Enfin pour connaître vos droits la Caf met à votre disposition un outil interactif : Le parcours séparation
“Parcours séparation” : un outil Caf séparation sans divorce
Pour comprendre le fonctionnement de cet outil prenons l’exemple suivant : Mathilde est séparée de fait et elle se demande comment la Caisse d’allocations familiales peut lui venir en aide.
Sa situation est la suivante:
- Mathilde déclare sa nouvelle situation à la Caf
- Elle a des enfants dont la résidence est alternée
- Elle est en recherche d’un mode de garde
- La pension alimentaire enfants est fixée
- Elle rencontre des difficultés liées au logement
Au vu des renseignements apportés par Mathilde, l’outil de la Caf lui propose diverses pistes qui concernent :
- La prestation d’accueil du jeune enfant, PAJE
- Le choix du mode de garde : la Caf informe sur les aides possibles ainsi que que sur les différents mode garde autour du domicile
- Les enfants en garde alternée
- La pension alimentaire pour les enfants
- L’allocation de soutien familial ASF
- Une médiation familiale sous forme d’écoute et d’échanges autour de la séparation et des problèmes rencontrés
- Les aides au logement en cas de séparation des parents
À savoir : Votre Caf peut vous verser une aide financière d’urgence en cas de violence conjugale et vous aider, vous et vos enfants, à vous éloigner du conjoint violent.
Si comme Mathilde vous êtes concerné(e) par la séparation de fait nous vous conseillons de faire le parcours interactif Caf.
Séparation de fait, ce que dit la loi
Depuis le mois de novembre 2018, une disposition légale spécifique dans le cas de violences conjugales est mise en place. L’épouse qui quitte le domicile conjugal n’est plus soumise à la solidarité financière pour ce qui est du paiement du loyer.
Quand s’arrête la séparation de fait ?
Ce type de séparation n’étant pas réglementé, il n’existe aucune limite juridique et les époux peuvent vivre séparés aussi longtemps que la situation leur convient.
Il existe toutefois quelques circonstances qui peuvent mettre fin à cette situation :
- Le désir des époux de reprendre la vie commune
- Le déclenchement d’une procédure de divorce par l’un des conjoints
- Le décès de l’un des époux
Ainsi, bien que peu pratiquée, car susceptible d’être l’occasion de nombreuses complications, la séparation de fait reste une solution simple et pratique pour se séparer de son conjoint sans divorcer.
FAQ – Questions fréquentes sur la séparation de fait
Peut-on toucher les allocations familiales sur un seul compte en cas de séparation de fait ?
Oui, mais cela nécessite une déclaration spécifique à la Caf. Si les deux parents sont toujours mariés mais vivent séparément, ils doivent s’entendre sur le parent désigné pour percevoir les prestations familiales. En cas de désaccord, la Caf peut intervenir pour répartir les aides, notamment si la garde est alternée. Il est donc important de déclarer votre nouvelle situation familiale dans votre espace allocataire et d’indiquer le mode de résidence des enfants, afin que les droits soient évalués équitablement.
Est-ce qu’une séparation de fait peut être utilisée comme preuve dans une procédure judiciaire ?
Oui, une séparation de fait peut constituer un élément de preuve dans certaines procédures judiciaires, comme un divorce pour altération définitive du lien conjugal ou pour faute. Elle peut aussi être prise en compte dans le calcul des pensions alimentaires ou l’attribution de la garde des enfants. Pour cela, il est utile de conserver des preuves matérielles : courriers échangés, changement d’adresse, documents administratifs, etc. Une séparation établie dans les faits peut avoir des effets indirects devant le juge.
Peut-on bénéficier de l’aide juridictionnelle en cas de conflit lié à une séparation de fait ?
Oui, si vous êtes confronté(e) à un litige lié à une séparation de fait (conflit parental, pension, partage de charges…), vous pouvez demander l’aide juridictionnelle. Cette aide permet de couvrir tout ou partie des frais d’avocat, selon vos ressources. Elle peut s’avérer précieuse si vous devez saisir un juge aux affaires familiales pour faire valoir vos droits.
Une séparation de fait a-t-elle un impact sur les successions ?
Non, tant qu’aucun divorce ou séparation de corps n’a été prononcé, les époux restent héritiers l’un de l’autre. En cas de décès de l’un des conjoints, l’autre conserve donc tous ses droits successoraux, même en cas de séparation de fait ancienne ou durable. Si les époux souhaitent exclure cette éventualité, il est nécessaire d’engager une procédure de divorce ou de modifier leur testament, car la séparation de fait n’a aucune valeur juridique sur le plan successoral.
Crédit photo : © AIExplosion / Adobe

Depuis mon entrée dans l’équipe du site aide-sociale.fr en 2018, j’ai à cœur de partager ma connaissance des aides sociales existantes et des démarches administratives. Je m’y emploie en les expliquant de la façon la plus exacte et la plus claire possible afin de les rendre accessibles à tous.