des milliards d'euros d'aides sociales ne sont pas réclamés

La France a établi une solide tradition de protection et d’aide sociale de l’état. La constitution de la Vème république prévoit notamment que : “Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence“.

Or il existe aujourd’hui un phénomène nuisible à la bonne marche de la solidarité nationale : le non-recours aux droits. Bien qu’il soit difficile de le mesurer précisément, sachez qu’en France certaines prestations majeures frisent le taux de 40% de personnes qui ne la perçoivent pas alors qu’elles y sont éligibles. Plusieurs facteurs expliquent ce chiffre si élevé, mais à l’évidence, les personnes qui ne recourent pas à leurs droits manquent d’informations et sont découragées par les démarches administratives trop complexes.

Les pouvoirs publics semblent peu à peu se préoccuper de cette question du non-recours qui représente un enjeu de taille pour les années à venir. En effet, il s’agit d’une part d’endiguer les difficultés croissantes des personnes en situation de pauvreté et le creusement des inégalités sociales, et d’autre part de contenir le coût de l’aide sociale dans des limites raisonnables.

Alors, vers où se dirige-t-on ? On continue de stigmatiser les personnes les plus fragiles en les taxant d’assistés ou doit-on reconsidérer la solidarité comme l’un des piliers de la république et exiger que chacun puisse en bénéficier ?

 

Qu’est-ce que le phénomène de non recours ? Explications

Le non-recours concerne les prestations sociales versées ou attribuées par différents organismes, comme la CAF, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie ou Pôle EmploiAinsi, il est caractérisé lorsqu’une personne, en tout état de cause éligible à une prestation sociale, ne la perçoit pas. Le phénomène concerne à la fois les aides financières, comme les allocations et les aides non financières dans le cadre par exemple de service à la personne.

Par exemple, une personne dont les revenus sont modestes souscrit un contrat de mutuelle santé et paie chaque mois sa cotisation à taux plein. Elle pourrait percevoir la CSS (Complémentaire Santé Solidaire), mais n’en a pas fait la demande. Elle est donc en situation de non-recours.

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Totalement absent du débat public il y a encore quelques années, le phénomène de non-recours suscite désormais de plus en plus d’intérêt. Bien que les médias ne se soient pas encore emparés réellement de la question pour en faire le grand sujet de société qu’il devrait être, les pouvoirs publics multiplient aujourd’hui les travaux pour mieux comprendre le phénomène.

D’ailleurs, il existe un observatoire du non recours dont les travaux permettent de prendre conscience de la réalité du phénomène. Ainsi, l’ODENORE (Observatoire de non-recours aux droits et aux services) publie depuis Mars 2003 de nombreuses études sous la houlette de Philippe Warin, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de la question.

 

Quels sont les chiffres non-recours ? des taux étonnamment hauts

Jusqu’à 40% de non-recours sur certaines aides sociales en France

Avant toute chose, sachez qu’il n’existe aujourd’hui aucun outil capable de mesurer avec précision le phénomène. Toutefois, de  nombreuses études permettent de l’évaluer à prés de 40%.

Le non-recours possède un caractère multifactoriel et demeure difficile à évaluer, car le nombre de personnes éligibles aux différentes aides est aujourd’hui une inconnue.

Par conséquent les chiffres que nous avançons dans cet article proviennent d’études et de rapports officiels, sur certains dispositifs sociaux précis et valables à la date donnée. Toutes les sources sont disponibles et indiquées pour chacun d’entre eux.

Non recours RSA

Ces premiers chiffres émanent des constatations de MME Gisèle BIÉMOURET et M. Jean-Louis COSTES : députés auteurs du RAPPORT D’INFORMATION sur l’évaluation des politiques publiques en faveur de l’accès aux droits sociaux du 26 octobre 2016. Les taux de non-recours sont estimés sur 3 aides qui figurent parmi les plus notoires pour la population.

Le rapport évalue le non-recours pour :

    • Le Revenu de Solidarité Active 36% de non-recoursLe RSA est un minima social conçu pour assurer à chacun un moyen de subsistance.
    • L’Aide Complémentaire à la Santé entre 57 et 70%  de non-recours : L’ACS est une aide pour souscrire à une mutuelle à prix réduit, accessible aux personnes possédant de faibles ressources.
    • La Couverture Maladie Universelle Complémentaire entre 21 et 34% de non-recours : La CMU-C est une mutuelle totalement gratuite réservée aux plus démunis afin de garantir l’accès aux soins.

La CMU-C et l’ACS n’existent plus aujourd’hui sous cette appellation. Elles sont désormais regroupées par la nouvelle Complémentaire Santé Solidaire

Par ailleurs, il existe des données officielles sur le non-recours à la prime d’activité, prestation qui permet aux travailleurs à ressources modestes d’obtenir une prime mensuelle pour améliorer leurs revenus.

La Direction Générale de la Cohésion Sociale a publié en 2017 un rapport d’évaluation de la prime d’activité. Cette étude, disponible ici, fait apparaître le taux de non-recours estimé (dans les pages 18 et 19) :

    • Prime activité :  27% de non-recours

Bien qu’il ne soit pas aujourd’hui possible d’évaluer le non-recours sur les plus de 300 dispositifs d’aide sociale existants, les quelques estimations ci-dessous glanées à l’aide d’études réalisées par des organismes compétents permettent de se faire une idée de l’ampleur du phénomène.

    • APA-D (allocation personnalisée à l’Autonomie à domicile) entre 20 et 28% de non-recours en 2016, selon le rapport de la DREES.
    • Chèque énergie 20% de non recours lors des années d’expérimentation entre 2015 et 2017, essentiellement dans le département du Pas de Calais (lire l’article). Depuis le 01 janvier 2018, cette nouvelle tarification sociale de l’énergie s’est généralisée. Le non-recours au chèque énergie peut paraître étonnant compte tenu de son attribution automatique. Néanmoins il existe des problèmes de réception et de bonne compréhension de son fonctionnement qui génère un taux de non-recours important.
    • Allocations familiales :  le dernier rapport du Secours Catholique pour l’année 2018 (p42) constate une baisse de l’accès aux allocations familiales. Pour le démontrer, le rapport s’appuie sur une comparaison entre les années 2010 et 2017 et concernant les familles avec 2 enfants accueillies par le Secours Catholique. Celle-ci  fait apparaître une baisse de 5% (83% de ces familles percevaient les allocations familiales en 2010 et seulement 78% en 2017).

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Une donnée supplémentaire intéressante permet de se rendre compte de l’importance du phénomène de non-recours. Il s’agit des résultats du dispositif mis en place par la CAF : “Les rendez-vous des droits“.

La CAF invite les personnes en situation de précarité et celles en dehors des dispositifs sociaux à faire le point sur leur situation auprès d’un conseiller. Le point est effectué de manière globale et ne concerne pas uniquement les aides de la CAF. Lors de l’année 2016, plus de 250.000 entretiens ont été réalisés. L’étude menée par la DREES sur ce dispositif fait apparaître que 63% des personnes en situation d’accéder à une prestation y parviennent après un entretien ” rendez-vous des droits”.

Malheureusement et bien qu’il faille saluer cette initiative de la CNAF, les rendez-vous des droits demeurent un arbre qui cache la forêt du non recours aux aides de la CAF. Pour bien comprendre, consultez le rapport  vivre en situation de non recours de P.Mazet et H.Revil (chercheurs à l’Odenore). Cette étude se penche sur le non recours dit frictionnel, c’est à dire l’arrêt des versements alors même que la personne reste éligible à l’aide. Cette forme de non recours est très fréquente et se produit notamment en cas d’erreurs ou de retards de déclarations à la CAF.

 

Pourquoi les taux de non-recours sont-ils si élevés ?

5 raisons pour mieux comprendre l’ampleur du phénomène

Le phénomène de non-recours est passé durant des décennies à travers les mailles des systèmes de surveillance.

Au début des années 2000, après la loi de 1998 contre l’exclusion, les pouvoirs publics se sont enfin préoccupés de cette question. En parallèle, l’ODENORE a été créé en 2003 dans le but d’observer le phénomène.

Expliquer pourquoi les gens n’accèdent pas à leurs droits n’est pas une mince entreprise. Toutefois, l’ODENORE est parvenu à dresser une typologie du non-recours. Elle évolue régulièrement au fil des connaissances qu’apportent les nouveaux travaux et comporte aujourd’hui 5 catégories de raisons pour mieux comprendre le phénomène.

 

Le non-recours par non-connaissance

Cette dénomination regroupe 3 facteurs très simples qui démontrent l’importance de transmettre des informations de qualité  à la population en matière de prestations sociales.

    • Soit les personnes ne connaissent tout simplement pas les aides non recours par non proposition
    • Soit les personnes ne comprennent pas l’aide (on peut prendre ici l’exemple de l’ACS : beaucoup de gens en ont entendu parler, mais ne savent pas réellement ce que c’est ou comment l’obtenir)
    • Soit les personnes connaissent l’aide, mais ne se pensent pas concernées

Selon Philippe Warin directeur de l’observatoire, la non-connaissance constitue une forme très fréquente de non recours (cf. un entretien accordé au Berry Républicain).

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Le non-recours par non-proposition

Il existe même une réciproque, en quelque sorte, de la non-connaissance, c’est la non-proposition. L’aide n’est pas proposée par les agents ou conseillers qui officient dans les différents organismes chargés de distribuer l’aide sociale.

La non-proposition est caractérisée lorsque :

    • Les agents ne connaissent pas eux-mêmes l’aide qui devrait être attribuée
    • Les agents pensent que la personne n’est pas concernée

Le fait qu’une aide ne soit pas recourue, car elle n’est pas proposée est un marqueur de dysfonctionnement du déploiement de l’aide publique. De plus, on ne parle de non-proposition que lorsqu’un agent “oublie” une aide qui dépend de son propre organisme.

Par exemple, imaginons un parent isolé faisant le point sur sa situation dans son agence CAF. Il explique à l’agent qu’il peine à se faire payer sa pension alimentaire par son ex-conjoint. Le rôle de l’agent de la CAF est alors d’orienter cette personne vers l’ARIPA, dont le but est d’aider les parents isolés dans le recouvrement des pensions impayées. Dans le cas contraire, nous sommes face à un cas typique de non-recours par non-proposition.

Concernant les personnes en situation de grande précarité, il arrive que des agents préfèrent différer l’accès à certaines prestations lorsque les démarches sont trop complexes. Mieux vaut alors un accès progressif et par étape à l’ensemble des aides pour ne pas décourager ces personnes qui pourraient décider de se maintenir hors de tout dispositif d’aide.

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Le non-recours par non-demande

Il s’agit ici du refus d’effectuer une demande par une personne éligible et informée. Une certaine lassitude ou découragement face à l’administration est souvent à l’origine de cette forme de non-recours. Les bénéficiaires potentiels peuvent également éprouver un sentiment de honte lié à la stigmatisation des personnes aidées.

Ainsi lorsque le non-recours est un choix :Démarches aides sociales complexes

    • Les personnes n’adhèrent pas à la proposition (refus de ses principes ou conditions)
    • Les demandeurs potentiels souffrent de problèmes d’estime d’eux-mêmes
    • Désintérêt pour la prestation (mauvais rapport entre l’implication nécessaire à la bonne conduite de la démarche et l’apport concret de l’aide)
    • Les personnes se tournent vers d’autres alternatives que la demande d’aide (solidarité familiale…)

En revanche la non-demande peut être également contrainte par :

    • Le découragement, la lassitude parfois même le stress devant la complexité de la démarche
    • Une vision négative de la demande (je n’y aurais pas droit, je n’ai aucune chance de l’obtenir, je n’en suis pas capable…)
    • Des difficultés à comprendre ou exprimer ses propres besoins
    • Une peur des conséquences de l’obtention (ou de la demande) d’une aide sur les déclarations de revenus, avis d’imposition …
    • La peur de la stigmatisation vis-à-vis des proches, de l’entourage, de la société…
    • Un sentiment de discrimination
    • La perte de l’idée même d’avoir des droits : l’impression de quémander
    • Des problèmes de transport en cas de rendez-vous

Une étude de la DREES sur les raisons qui motivent l’abandon des démarches à la suite d’un rendez-vous des droits montre que 2% des personnes interrogées ne mènent pas leur demande à terme en raison de ce que pense leur entourage ou du fait de dépendre de l’aide sociale.

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Le non-recours par non-réception

Les bénéficiaires potentiels font une demande, mais ne l’obtiennent pas. Soit ils ne parviennent pas à mener la démarche à terme, soit ils sont découragés par le discours des agents des organismes sociaux.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce phénomène :

    • La demande d’aide est abandonnée : il existe de nombreuses raisons (mauvaise compréhension des démarches à accomplir, document manquant…)
    • Le bénéficiaire n’est pas d’accord avec l’aide proposée (considérant par exemple qu’elle est trop faible)
    • La procédure n’est pas menée correctement
    • L’attribution de l’aide peut être gênée par un mauvais fonctionnement du service prestataire
    • Le bénéficiaire est victime de discrimination

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Le non-recours par non-orientation

Il s’agit de la toute dernière forme de non-recours identifiée par l’Odenore. Elle est caractérisée lorsqu’une personne qui devrait bénéficier d’une aide n’est pas suffisamment conseillée et accompagnée pour réaliser la démarche. Cette  nouvelle typologie étudie les comportements de l’entourage du bénéficiaire potentiel (un proche, un employeur, un médecin, une association).

Pour démontrer le non-recours par non-orientation, l’Odenore a publié une enquête qui concerne l’accès à la Prestation Compensatoire de Handicap pour des personnes souffrant de troubles psychiques. Cette aide est attribuée par les MDPH (Maisons Départementales des Personnes Handicapées). Le travail réalisé par l’Odenore montre un phénomène complexe d’accès à l’aide freiné par la réticence voire le déni des bénéficiaires potentiels et au sein duquel le rôle de l’entourage est prépondérant.

Il existe de nombreuses manifestations de non-recours par non-orientation. On peut penser aux jeunes en situation de décrochage, qu’il soit professionnel ou scolaire. Il arrive que les parents, famille, enseignants et entourage global abdiquent face à la difficulté de résoudre les problèmes.

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Quelles sont les solutions pour lutter contre le non recours ?

Les chiffres l’attestent, il est de plus en plus urgent d’endiguer le phénomène de non-recours. Chaque année, il représente plusieurs milliards d’euros non pourvus.

À court terme, ces sommes constituent certes une belle économie pour les comptes publics. Mais sur le long terme, le non-recours entraîne également de lourdes dépenses. Par exemple un non-recours aux soins est parfois à l’origine de graves pathologies qui s’avèrent ensuite extrêmement coûteuses lorsqu’elles sont prises en charge par la Sécurité Sociale.

La lutte contre le non-recours dépend à la fois de l’arrêt de la stigmatisation des bénéficiaires d’aides sociales et de la simplification des démarches pour les obtenir. Les simulateurs d’aides peuvent également constituer un précieux outils pour les publics familiers au numérique.

En finir avec la stigmatisation des bénéficiaires

L’assistanat est un cancer

Cancer de l'assitannatEn dehors de considérations purement économiques, le non-recours contribue à creuser les inégalités.

En effet, depuis le début des années 2010, la tendance est à la culpabilisation des bénéficiaires de minimas sociaux, assimilés à des assistés, des tricheurs. Laurent Wauquiez, actuel chef de file des républicains, considère par exemple que l’aide sociale est un cancer pour la société. La déclaration, à lire ici, date certes de 2011, mais semble presque d’actualité au vu du climat de défiance qui plane sur les bénéficiaires d’aides de l’état.

Récemment encore, le président Macron s’est montré pugnace, si ce n’est agressif, envers “les pauvres” pour lesquels l’état “dépense un pognon de dingue“.

Évidemment on va pas ici nier l’intérêt de lutter contre la pauvreté de manière préventive comme le souhaite le président. Il fait d’ailleurs le parallèle avec le domaine de la santé pour lequel les dépenses consacrées à la prévention seraient compensées par les économies réalisées s’il y avait moins de malades.

Mais exhorte-t-il les patients à “se responsabiliser” face à la pathologie comme il le pense à propos des bénéficiaires de minimas sociaux ? Cette injonction à sortir de la pauvreté par ses propres moyens participe à la stigmatisation de personnes qui ont un réel besoin d’aide de la même manière qu’un patient a besoin d’un traitement pour guérir.

En 2011, le député Dominique Tian avait publié un rapport parlementaire pour démontrer l’existence de la fraude sociale dans notre pays et estimer son coût. Bien qu’il soit légitime de vouloir identifier et sanctionner les tricheurs de tous poils, riches comme pauvres, ce rapport a contribué à stigmatiser l’ensemble des bénéficiaires des aides sociales.

Cette stigmatisation des bénéficiaires de minimas sociaux est utilisée par les hommes et femmes politiques pour défendre les idées libérales et donc davantage de désengagement de l’état. Toutefois, en dehors de toute vision politique, la stigmatisation véhicule également un climat malsain au sein duquel les discours haineux ne s’appuient que sur des idées reçues.

Pour vous en convaincre, consultez notre infographie sur la fraude sociale.

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Cette stigmatisation était d’ailleurs favorisée par le contexte politique qui n’a guère évolué depuis : Les thématiques de réduction de la dette publique, d’un état vivant au-dessus de ses moyens sont toujours aussi prégnantes dans le débat public et entretiennent l’idée que les personnes aidées sont nuisibles au développement et à la bonne santé du pays.

Or, il est évident qu’un système de protection sociale comporte un coût ! Interrogé sur France Inter, Patrick Doutreligne, président de l’Union Nationale Interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux,  alerte sur le discours ambiant : “Il faut arrêter avec cette culture sociale, qui veut que les pauvres doivent, en quelque sorte “mériter” les aides qu’ils reçoivent. Le discours sur l’assistanat est désastreux”.

 

La simplification des démarches : une évidence

Améliorer les mécanismes d’accès aux prestations est nécessaire. Peut-être faudrait-il songer à graisser les rouages de l’administration. En la matière, de très nombreuses idées fourmillent çà et là.

L’Odenore contribue d’ailleurs largement à la recherche de solutions concrètes, tout comme bon nombre d’hommes et de femmes politiques. non recours aux droits

Parmi les solutions imaginées, on peut citer :

    • L’automatisation des aides
    • Le Guichet unique
    • La déclaration unique

Ces idées sont naturellement pétries de bon sens, mais constituent un gigantesque chantier. En effet, elles nécessitent un processus technique complexe, de coordination et d’ajustements des différents organismes et prestataires concernés.

Toutefois, une solution moins difficile à mettre en place pourrait être envisagée :

    • L’accueil inconditionnel

Ce principe repose sur l’idée suivante : toute personne reçue par tout organisme à vocation sociale doit pouvoir exposer l’ensemble de sa situation.

Prenons un exemple concret : Aujourd’hui, si vous perdez votre travail, vous vous inscrivez à Pôle Emploi. Votre salaire est remplacé par une allocation (en l’occurrence l’ARE). Ce changement entraîne une baisse de vos revenus vous rendant par la même éligible à des aides que vous ne perceviez pas en travaillant (par exemple la PUMA, ex CMU).

Or pour bénéficier de la PUMA, vous devez comprendre par vous même que votre nouvelle situation vous permet d’en bénéficier et de formuler une demande auprès de la CPAM.

Avec l’accueil inconditionnel, l’une des prérogatives de Pôle Emploi (comme de tout organisme prestataire) serait de faire un point global sur votre situation, de détecter les aides que vous devriez percevoir et de vous diriger vers les organismes chargés de les distribuer.

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Sachez d’ailleurs que cet accueil inconditionnel existe dans les CCAS (Centres communaux d’Action Sociale). Sans doute faudrait-il encourager davantage les collectivités locales dans ce sens. Les “Rendez-vous des droits” mis en place par la CAF depuis 2016 constituent également un exemple à suivre et donnent des résultats très intéressants dans la lutte contre le non-recours.

 

L’exemple de la plateforme PFIDASS : lutter contre le renoncement aux soins

L’assurance maladie a mis en place un nouvel outil qui a pour but de lutter contre le non recours aux soins. Il s’agit d’un dispositif départemental nommé PFIDASS (Plateforme d’Intervention départementale pour l’accès aux soins).

L’accès aux soins fait partie des droits constitutionnels. Or, cette initiative fait suite à un constat alarmant : 26% des assurés déclarent renoncer à se soigner faute de moyens, de problèmes de délais et de disponibilité (étude menée par l’Odenore en 2016).

Le dispositif a d’abord été expérimenté entre 2016 et 2018 dans certaines caisses départementales et s’est depuis généralisé à l’ensemble des caisses d’assurance maladie.

Son fonctionnement repose sur un principe très simple :  repérer des situations de renoncement aux soins et y remédier. Pour cela des conseillers sont formés dans chaque département. Leur rôle est alors d’aller au-devant des personnes en situation de renoncement et leur proposer des solutions.

Lors de l’expérimentation, l’Odenore a conduit des travaux pour mesurer l’efficacité du dispositif PFIDASS (lire le document). Les résultats se sont avérés très prometteurs, car dès lors que le contact a été renoué par les conseillers PFIDASS, plus de la moitié des personnes captées souhaitent trouver des solutions à leurs difficultés et être accompagnées dans leur parcours de soins.

 

La possibilité pour chacun de percevoir un revenu universel

À l’évidence, l’idée du revenu universel constitue un outil radical de lutte contre le phénomène de non-recours. Son principe repose sur l’idée d’une allocation unique. Ainsi, chacun reçoit chaque mois une somme d’argent, quelle que soit sa situation personnelle, salarié, étudiant, chômeur ou retraité.

En théorie, le revenu universel pourrait remplacer à lui seul tous les dispositifs existants et mettre fin à la complexité générée par la multiplication des aides et des organismes chargés de les distribuer. Le phénomène de non-recours serait alors purement et simplement annulé ou du moins n’existerait que de façon résiduelle.

Lors de la campagne présidentielle en 2017, le candidat Benoit Hamon a été le premier homme politique français à élaborer un projet concret dans ce sens. Ainsi, il proposait un Revenu Minimum d’Existence aux personnes qui gagnent moins de 1,9 le smic.

Le gouvernement en place travaille également à la mise en place d’un Revenu Universel d’activité à l’horizon 2020, alloué sous condition de ressources et regroupant les principales prestations sociales versées actuellement comme le RSA, les APL et la Prime d’activité.

L’idée du revenu universel progresse aujourd’hui de par le monde entier et son principe tend à devenir consensuel. En revanche, il existe des visions de ce revenu radicalement différentes, voire opposées selon qu’elles soient appuyées par des arguments étatiques ou libéraux.

Pour bien comprendre, voici une explication en vidéo. 

Les simulateurs d’aides permettent ils de faire reculer le non-recours ?

Aujourd’hui il est possible d’effectuer des simulations de vos droits en saisissant directement vos informations et données personnelles. De plus en plus d’organismes possèdent cet outil, à l’image de la CAF, par le biais de votre espace personnel (comme la simulation d’APL par exemple).

Cependant, en matière de lutte contre le non-recours, les simulateurs d’aides sont des outils à double tranchant. Certes, ils permettent de faciliter la recherche des aides et les démarches associées. Ce faisant, ils contribuent à lutter contre différentes formes de non-recours (non-connaissance, non-réception et non-proposition).

En revanche, le développement des simulateurs sur internet entraîne un effet pervers. Ils ne sont utiles qu’aux personnes déjà soucieuse d’améliorer leur situation et relativement à l’aise avec la révolution numérique. Or, le non-recours est souvent lié à une situation de décrochage. Devant à la complexité des démarches, mais aussi devant la maîtrise des nouveaux outils numériques pour les réaliser (formulaires en ligne, espaces personnels sur les sites des administrations, gestion des innombrables mots de passe, boites mail …).

Autre problème d’importance, celui de l’illettrisme qui entraîne de fait de nombreuses situations de non-recours auxquelles il faut apporter au minimum des solutions automatiques à défaut de réponses humaines. Ainsi, le développement des simulateurs est à la fois un formidable vecteur de simplification dans l’accès aux aides, mais qui génère aussi davantage d’exclusion.

Par ailleurs, il existe très peu de simulateurs qui élargissent leur projection à l’ensemble de vos droits, c’est à dire qui passent en revue les différents prestataires susceptibles d’attribuer une aide.

Aide-sociale.fr met à votre disposition un outil dont l’objectif est de vous informer et de vous orienter parmi les aides sociales. Vous remplissez un questionnaire (dans le respect de la confidentialité) et le simulateur liste les aides que vous pouvez percevoir. Il permet également d’accéder aux marches à suivre pour réaliser vos demandes.



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